dimanche, mars 06, 2011

Air du temps

C'est la fin de la saison des clémentines. Mais après un hiver révolutionnaire sur l'autre rive de la Méditerranée, là d'où viennent souvent ces succulentes clémentines, de quoi aura l'air notre printemps européen? Qui sait... En tout cas, une chose est sûre: si les statistiques sont la météo des révolutions, la vague de contestation pourrait traverser la Mare Nostrum.
Chômage? Explosif. Pauvreté? Endémique. Mécontentement? Evident.
Oui mais voilà, la contestation aurait trouvé des relais là où elle sera la moins bien portée. Selon un sondage réalisé par l'institut Harris Interactive pour Le Parisien, Marine Le Pen arriverait en tête du 1er tour des élections présidentielles, s'il avait lieu dimanche prochain, et si les candidats des "deux grands partis" (PS et UMP) étaient Martine Aubry et Nicolas Sarkozy. Et si, aussi, la campagne avait réellement commencé. Et si, encore, il était assuré que ce soit ces personnalités qui se présentent. Et si, et si, et si...
La liste des "si" en dit déjà long sur la valeur même de ce type d'exercice. Trop d'inconnues obligent à la mettre en question. S'il est inquiétant de voir que la nouvelle star d'extrême-droite gratifiée de tant de succès, c'est plutôt sur la stratégie des médias qu'il faut s'interroger. A quoi sert, aujourd'hui, de faire monter la peur en agitant ce blond épouvantail?
Sans doute, justement, à désamorcer la contestation qui croît. Car pendant ce temps, nul n'aborde les questions de fond... Le chômage et ses causes, la pauvreté et ses conséquences... Qui furent les ingrédients de la montée d'autres partis xénophobes à des époques plus anciennes.
Retour, alors, sur l'Histoire. En 2002, Dominique Strauss-Kahn, invité par des étudiants de Sciences Po, expliquait dans l'amphi Boutmy: "je ne comprends pas, dans les autres pays européens, l'alternance se passe bien"... Ah, la belle affaire. La Gauche venait de se faire balayer, mais au lieu, déjà, de s'interroger sur les causes de cet échec, lui ne voyait qu'un petit accroc dans le tissu démocratique. C'était pourtant déjà une déchirure profonde entre un peuple qui n'avait pas eu le sentiment de voir ses aspirations assouvies (revalorisations salariales, créations d'emplois, fin des "affaires", amélioration du niveau de vie...) et un gouvernement qui s'était satisfait de mesures se fondant sans problème dans le moule néo-libéral. Que ne contestait pas un DSK, qui allait d'ailleurs devenir grâce au soutien sans faille de Nicolas Sarkozy, Directeur du FMI.
Premier problème donc: à quoi sert de voter à Gauche si elle ne relaie pas la contestation sociale? si elle ne répond pas aux aspirations populaires?
Ce serait malheureusement trop beau de s'arrêter. Car il y a un sacré problème: l'abandon de "l'idée européenne". Certes, certains diront: "l'Europe sociale n'existe pas" (à lire: http://www.medelu.org/spip.php?article227). Si l'argumentation de ces auteurs est très étayée, admettons que l'on puisse contester leur thèse fondamentale: l'Europe n'est pas un produit de la classe dominante pour enfoncer les plus pauvres. Reconnaissons cependant que le rapport de forces ne joue aujourd'hui pas en la faveur de la classe travailleuse. D'où le deuxième problème: que voulons-nous faire de l'Europe et quel est le projet européen des dirigeants. Aïe. Ce qui se passe en Grèce, en Irlande, en Espagne, au Portugal, en Roumanie... n'est pas de bon augure. Mais de nouveau, ce n'est pas en ayant comme proposition essentielle soit une sortie de l'Europe - comme la nouvelle blonde égérie des démons racistes le professe - ou en gobant l'idéologie dominante - comme le Docteur Maboul du FMI la développe que l'on pourra s'en sortir. Là encore, plus que des sondages, des débats de fond sont nécessaires. Qui obligeraient cependant à montrer que certains, comme DSK et Sarko, n'ont pas de vision fondamentalement différente. Et si, c'était là, une troisième raison de ces sondages administrés sans cesse: éviter les questions qui fâchent.
C'est la fin de la saison des clémentines. "Un jour pourtant, un jour viendra, couleur d'orange..." prédisait Aragon. Le soleil brille mais l'humeur est grise. Par chance, un temps arrive, celui des cerises. Gagnera-t-il la rue?
http://www.deezer.com/listen-6098129


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jeudi, août 21, 2008

Les States (1)

Donc le Calamar "est parti un beau samedi comme un maudit malfaiteur", comme chanterait l'autre ;-)
Paris, restaurant, lessive, Lolo, Yas', Steph' et puis une courte nuit de sommeil - tant qu'à faire, autant continuer sur la lancée. Pourquoi? Pour ça!


C'est vrai, j'ai abandonné sur mon chemin tant de choses que j'aimais bien. Je n'ai même pas dit adieu à tous amis. Bon, je suis revenu. Sans un sou, c'est sûr! Mais bon, c'est ue autre histoire.
En attendant, après la courte nuit, il avait fallu se lever, et ça avait marché. Le Calamar prit ses cliques et ses claques, valise à la main et sac au dos et ops, direction l'aéroport. Là, il a retrouvé sa fidèle cops, plus besoin de la présenter...
Elle arrivait fraiche et dispose malgré l'heure plus que matinale elle avait dû se lever. Autant dire que les 15 heures de vol s'annonçaient champêtre, en plein ciel.
Billets en main, valise en soute, et même si ce n'était pas un grand Boeing, mais un bel Airbus, il ne restait plus qu'à attendre le décollage... pour gagner Los Angeles!


Trahison à la cause francophone, certes, mais bonheur des yeux en tout état de cause.

La suite au prochain numéro...

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mercredi, août 20, 2008

Le Calamar reprend du service (3 - et fin... juste pour ce titre!)

La fête avait battu son plein. Le stade de Capbreton, envahi par une foule en transe, se vidait peu à peu de son public après un concert très festif de Cali. C'était vendredi. Et déjà, il fallait songé au départ. Quelle destination?

C'est vrai. Après une petite semaine à rencontrer des Daniel Boucher, des Stéphanie, des Jenny, à boire du Canada et débattre en québécois, à être avec des Momo, Pieuvre, Jean-Mi et tant d'autres passionnés par la défense de la cause, c'eût été logique. Aller déferler sur le Nord Américain, "revoir Montréal" comme chanterait l'autre mais le grand Boeing bleu de mer ne prenait pas cette destination. Mais le concert s'achevait. Et ces idées passaient fugitivement.

D'abord, les préoccupations étaient autres: songer à se lever le lendemain, pour ne pas rater le train pour Paris, préparer une nouvelle valise, car, vous l'entendrez bientôt, "j'me marie avec une valise", comme le dit, c'est un scoop, Thomas Fersen. Ou encore, plus terre-à-terre, que manger en rentrant? La dernière question est la plus simple à résoudre: prendre la direction du Compoir du 11ème, un fameux lieu où les Amis sont toujours au RDV. D'autres, sans doute, pensaient à prendre le large... Oui oui... Le Capitaine des Déferlantes mena son équipe d'une main de maître, de ce que le vent des blogs a rapporté.

Le lendemain, levé aux aurores (euh, disons, de mémoire de Calamar, vers 10h30 - mais tout dépend de la dose de sommeil accumulée, comme de celle en retard), histoire d'aller saluer Momo le Dirlo (qui accordait déjà des interviews!), de sauter dans la voiture de Christian et de rejoindre Dax.
La Gare de Dax! Ah. Le café qui réveille et symbolise le retour sur la capitale comme le pot en arrivant l'entrée dans la phase estivale et festivale. Ce TGV sur le quai, qu'on a hâte de quitter en arrivant. Peur de râter en repartant, mais en même temps, qu'on aimerait bien ne jamais devoir regagner si l'instant du festival pouvait se figer.
Gare de Dax, donc, le train était à l'heure. Des étoiles filaient encore, là-bas, en bord de mer, préférant les bords des plages aux bords de lits d'un LEP. Les Cowboys fringants, eux, entonnaient les leurs ailleurs. Mes Aïeux tournaient dans l'hexagone. Et j'allais partir. Mais pas pour Québec. Pas tout de suite, en tout cas.

Le Calamar, lui, allait plonger ses tentacules dans d'autres eaux salées...

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vendredi, août 15, 2008

Le Calamar reprend du service... (2)


J'en étais donc à la recette du cocktail pour la réussite, je parlais des nuits longues (et reposantes), des repas et de l'eau avalée en quantité (suffisante).

Il faisait beau sur la Côte landaise. Et ça nous rappelait des bons souvenirs. Disons que ça effaçait aussi ceux bien pluvieux de l'année dernière. Alors, on avait le goût d'aller faire des tours avec les Québécois. Monsieur Boucher avait décidé de nous initier au Canada. Un shot de vodka, un shot de jus de tomate + clamato (comprendre tabasco). Et ça a lancé le débat: fallait-il un seul shot de chaque, ou autant de shots de chaque qu'il y a de provinces canadiennes, ou encore, autant de shots de ce que l'on veut mais autant qu'il y a de provinces. Bref, même sans pluie, la soirée fut arrosée. Un départ qui en a fait parler plus d'un! Si si...

Les Déferlantes commençaient bien. Et tout est allé dans ce sens.

Inspiré par le Canada, qui sait, Daniel Boucher a produit un concert exceptionnel. Mes Aïeux ont emballé les foules. Nous avons même pu esquisser notre danse préférée, quasiment devenue légendaire.
Remède miracle - Mes Aïeux
Bon, d'accord, Fayo a encore la première place au top, mais quand même... toute une salle qui danse sur Mes Aïeux, c'est excellent!

Très belle découverte aussi, Samian. Rencontre avec Pierre Barouh. Les Cowboys fringants ont fait danser les foules, eux-aussi. Cali a pris un bain (de foule). Et tout et tout. Manquaient quelques personnes à l'appel: Vincent, qui faisait chauffeur pour un mariage ;-), Aurélia, qui a préféré le plages tunisiennes, Yas, qui n'avait pas assez de vacances pour venir. Ce fut malgré tout un très beau festival. Vivement la 12ème.

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Le Calamar reprend du service...

J'avoue, je n'ai pas été très prolixe ces derniers temps. Jours? Ou semaines? Non, mois. Rien ne garantit, bien sûr, que le retour ici annoncé du Calamar sera durable. Question de développement. Et, en ces temps de réchauffement climatique, qui sait!
En tout cas, le Calamar est parti déferler sur les plages. De l'Ouest, du Sud-Ouest. Des Landes d'abord. Pas beaucoup de plage, non, mais beaucoup de fête, de bonheur, de musique. Un Monsieur nommé Momo le Dirlo a encore organisé un bien beau festival. On a fait la fête. On a mangé (beaucoup) et bu (pas trop) et dormi (énormément) - euh, je ne suis pas sûr de l'ordre des parenthèses ;-)

Le tout en photo... Ou, si vous préférez, un roman photo!

Voilà, donc, Momo le Dirlo, en pleine action: interview pour la radio. Notez la passion qui l'anime, sa main s'élançant telle celle d'un tribun cherchant à convaincre!

Heureusement, la presse armée non d'un micro, mais d'un appareil photo, était là pour veiller et attraper au vol cette image intense, qui vaudrait des fortunes dans la presse people.

Mais ce n'est pas tout. Car sur un festival, il faut exercer des tâches diverses et variées. L'an passé, il paraît que d'aucune a dû repasser les chemises... et les boxers d'un artiste fameux, cette année, un autre artiste néanmoins fameux, mais moins connu de ce côté-ci de l'Atlantique a donné du fer à repasser, comme d'autres du fil à retordre. Non, rien à coudre, rassurez-vous...

Au passage, regardez ce dos courbé sur la tâche. L'élan du bras pour ne pas commettre le moindre faux plis qui aurait pu être assimilé à un faux pas: le manque de professionnalisme. Ah, il en a de la chance Momo le Dirlo, d'avoir une telle équipe de choc, multi tâches, se répétant sans cesse "c'est quand le bonheur?". Et affirmant, immédiatement, "ben, à Capbreton!". D'ailleurs, le public ne s'y est pas trompé qui est venu nombreux saluer les artistes divers et variés présents.

En tout cas, rassurez-vous, la lingère a survécu à cette oeuvre. Elle a même reçu des remerciements chaleureux de l'Artiste Majuscule pour sa collaboration remarquée à un spectacle réussi. Et oui, n'oublions pas, le Diable se niche parfois dans les détails. Y compris dans les plus petits plis des chemises.

Fin connaisseur du marketing (une formation en marketing politique, peut-être?), Momo le Dirlo avait confié à de splendides créatures les tâches marchandes. Histoire d'attirer le chaland? Sans aucun doute, la preuve par l'image...

L'histoire ne dit pas, cependant, si l'acquéreur, les yeux plongés dans... les titres du Cd, a succombé aux charmes évidents et aux talents oratoires de la Miss Festival!

Si elle est reconduite l'an prochain, gageons que cela signifie que les bénéfices (sur ce poste) furent bons.

Un bon Dirlo ne se promène jamais sans:
a) son portable








b) sa Belle Tendre et Chère...
Obligée, notons-le, de porter de noires lunettes pour éviter d'être poursuivi par de mauvais paparazzis. Seuls les meilleurs ont rarement réussi à fixer son image... Une exclusivité de Calamar, donc.

c) une bande de jeunes (de tous âges)



Tout ce savant cocktail donne un fabuleux festival... Par ici pour avoir plus de détail. D'ailleurs, c'était quand le bonheur? A surfer sur internet, on se dit que c'était bien là-bas, et pas que pour les bénévoles chics et chocs...

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lundi, juin 23, 2008

Danser sur les malheurs de l’Afrique


Dire de Seun Kuti qu’il est, sur scène, comme un poisson dans l’eau relève presque de l’euphémisme. Elle semble son lieu de vie dans lequel il évolue avec une aisance sidérante pour un jeune artiste (vingt-cinq ans) qui vient de sortir son premier album. Il faut préciser que, dès son plus jeune âge, il l’a habitée, la scène, dans les pas de son illustre père, Fela Kuti, roi de l’afro-beat mort il y a onze ans. Vingt-cinq ans, donc, mais déjà une longue carrière.

Il s’en défend pourtant : « Même si j’ai déjà fait le tour de l’Europe sur scène, ma carrière commence avec cet album. » Accompagné d’Egypt 80, l’orchestre fondé par son père, Seun Kuti sort un premier album, Many Things. « J’ai fait ce choix instinctivement, explique-t-il. Cette décision de jouer avec eux est à la fois un hommage et une continuité logique. » C’est reparti, donc, pour l’orchestre Egypt 80 avec, toujours, un Kuti à sa tête. Et, de l’afro-beat, il conserve les rythmes, mais aussi l’engagement. « L’afro-beat n’est pas un genre musical, c’est aussi un mouvement, une musique qui porte un message. »

Ses thèmes d’inspiration ? Son quotidien. « Je vis au Nigeria, je vois ce qui s’y passe tous les jours, comment les gens vivent. Et je ne peux pas y être insensible. Au contraire : ça m’inquiète. » Alors, Seun Kuti saisit la plume pour dénoncer, sur des sons afro-beat, les travers qui polluent l’Afrique : corruption, arnaques, magouilles, trafics sont sévèrement attaqués. Manque de démocratie et défiance à l’égard du système politique sont visés. « Nous n’avons pas d’élection, mais une sélection » : tel est le credo de Seun Kuti. Alors, avec Many Things, la musique se transforme donc en brûlot politique.

Pourtant, l’album fait danser. Sur scène, ils sont seize musiciens. Percussions, instruments à vent, choeur et une voix, puissante, qui fait passer son message. Pendant ce temps, le public, en transe, écoute les malheurs de l’Afrique. L’histoire se répète, dit en substance le chanteur. Sur scène aussi. Mais là, c’est tant mieux.

Disque. Seun Kuti et Fela’s Egypt 80 : Many Things (Tôt ou Tard).

Fabien Perrier

Article paru le 23 juin 2008

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samedi, juin 21, 2008

Le maudit tango de Melingo, génial Argentin

Entretien. Avec l’album Maldito Tango, Melingo, magicien des sonorités, fait le pont entre deux continents, entre poètes d’hier et d’aujourd’hui. Le tango chanté se fait ici chronique sociale.

Notes d’un piano, sons de clarinette, souffles de bandonéon : ces 11 chan- sons puisent aux origines du tango, fruit du mélange des rythmes sud-américains avec ceux venus d’Europe et, surtout, d’Afrique. Ce melting-pot, Melingo l’incarne : du côté paternel, son grand-père était de Thessalonique, en Grèce, sa grand-mère italienne, et du côté maternel, sa grand-mère était basque espagnole et son grand-père mi-autochtone et mi-africain. Avec lui, la descente dans les bas-fonds de Buenos Aires est un véritable bonheur.

Dans votre album, nombreuses sont les allusions aux faubourgs, aux quartiers, aux bas-fonds de l’Argentine. Pourquoi, aujourd’hui, les chanter ?

Melingo. Parce que l’histoire se répète. Certes, on ne danse plus le tango à tous les coins de rue. Mais les bas-fonds, ces quartiers un peu mal famés d’où vient le tango, sont toujours là. La notion de quartier est très importante à Buenos Aires : c’est un peu comme la patrie des habitants.

Dans ces quartiers régnait un esprit canaille. Existe-t-il encore ?

Melingo. Oui. Dans les banlieues de Buenos Aires, cet esprit un peu mafieux avec les petits chefs existe encore ! Cet esprit nous accompagne depuis l’indépendance, et même avant. Plus qu’un esprit, c’est une espèce de fantôme qui pèse sur nous. Alors les autorités ont souvent eu l’intention d’y mettre un terme, mais il semblerait que cette intention ne soit qu’une apparence. Nous gardons l’espoir que ça va s’améliorer, mais les choses ne changent pas.

Dans vos chansons, la police apparaît souvent. Pourquoi lui accorder une telle place ?

Melingo. C’est la plus mafieuse entre toutes ! En Argentine, la police est très militariste. Il y a une longue tradition de répression qui persiste. Une espèce de paranoïa existe toujours dans la population, qui renvoie à d’autres périodes de l’histoire. On pourrait dire qu’il y a des disparus dans la démocratie. Bien entendu, mon intention, dans mes chansons, n’est pas de dire que je suis du côté de la police ! Mais elle s’inscrit dans mes descriptions comme d’autres personnages récurrents. C’est la société, dans toutes ses contradictions impossibles à comprendre !

Il y a justement une chanson sur Montmartre, à Paris. Pourquoi avoir choisi ce texte ?

Melingo. D’abord parce que c’est un texte d’Enrique Cadicamo, un poète que j’admire beaucoup. Il parle du Paris des années vingt, qu’il a découvert avec Gardel. Les paroles de ce poème, au moment où il l’a écrit, décrivent déjà un Montmartre qui n’était plus celui qu’il vivait. D’un Montmartre d’avant les années vingt. Ce poème, ces mots, mélangés à ma musique, l’ont fait se transformer en une chanson. Mais c’est la musicalité de ses mots qui m’a attiré.

Est-ce aussi une façon de montrer l’universalité des quartiers populaires, ce qu’était Montmartre initialement ?

Melingo. Oui, c’est aussi une des raisons pour lesquelles j’ai choisi ce poème. Montmartre, c’est presque le parallèle du quartier de la Boca, à Buenos Aires : un quartier bohème avec beaucoup de peintres, d’immigrés…

Quel est le sens du titre de l’album, « maldito tango » ?

Melingo. Au départ, c’est une expression : « Maudit tango ! ». Mais elle reflète ce que j’ai voulu faire avec cet album. J’ai sélectionné des poèmes anciens, de poètes maudits, et j’ai fait une sorte de parallèle avec les poètes français ou colombiens. J’ai réuni des poètes du lunfardo, la langue des prisonniers, et j’ai essayé de créer une forme de pont imaginaire entre ces poètes.

Sur cet album, le tango moderne croise une critique sociale…

Melingo. C’est une revendication !

Mais vous considérez-vous comme un chanteur engagé ?

Melingo. En fait, je suis une personne engagée à 100 % dans mon travail et j’assume totalement les interprétations que l’on peut faire de mon travail. Je ne me considère pas comme un chanteur ou un musicien engagé socialement, mais plutôt comme un chanteur ou un musicien engagé musicalement, ce qui est d’ailleurs une autre façon d’être engagé socialement. La musique est un moyen de transmettre un message.

Qu’avez-vous envie de défendre ?

Melingo. La pauvreté… Être un chroniqueur, montrer la pauvreté, la faire connaître. C’est le seul travail que je peux faire. Mais je ne veux pas mélanger le pamphlet et l’art.

Vous considérez-vous comme un sociologue en musique ?

Melingo. Non, je ne me considère pas comme un sociologue ! Je suis musicien, poète… Et tout ce que je fais est un jeu de l’inconscient : je prends le mystère de la création, je le mélange avec mes propres connaissances et je vois ce que ça donne. Donc, l’intention de l’album n’est pas sociologique, mais il est vrai que dans mes albums il y a des revendications sociales. Par exemple, dans Se Igual je parle de ceux qui, à Buenos Aires, récupèrent les cartons. Cette chanson est donc une revendication sociale pour eux.

Quelles sont vos influences ?

Melingo. Bien sûr, Carlos Gardel : l’inventeur du tango chanté. Il fut la première icône de chanteur de tango. Son influence transcende ce que l’on pourrait croire à l’extérieur de l’Argentine. En Argentine, on pourrait dire qu’il est un saint. Mais aussi Astor Piazzola : avec lui il y eut une rupture, mais en même temps avec lui la boucle était bouclée. Ou encore, Caceres : c’est un Maître avec une majuscule. C’est dû à ce qu’il transmet, de manière directe comme indirecte. D’un côté, son approche du tango est didactique, de l’autre il a une influence inconsciente sur nous tous.

Melingo : Maldito Tango (Manana-Naïve)
Du 20 juillet au 9 août, Melingo sera en tournée en France (www.danielmelingo.com).
À écouter aussi : Tango Around the World (Putumayou World Music), qui montre la diversité du tango à travers le monde.
Entretien réalisé par Fabien Perrier

Article paru le 21 juin 2008

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lundi, avril 07, 2008

Les travailleurs européens unis pour le pouvoir d’achat

Ljubljana (Slovénie), envoyé spécial.

Samedi 5 avril, dans les rues de Ljubljana, la capitale slovène, la diversité était de surface : mélanges de couleurs, de langues ou de drapeaux des quatre coins de l’Europe. Mais, l’unité était véritable : les salariés européens, de 55 syndicats et 29 pays, étaient venus manifester pour une amélioration de leur pouvoir d’achat et de meilleures conditions de travail, à l’appel de la Confédération européenne des syndicats (CES). Les slogans témoignaient de cette unité sur tout le parcours de l’Euromanifestation qui a regroupé plus de 40 000 personnes (10 000 selon la police).

« En avant pour une Europe sociale ! »

Les Belges de la CSC, par exemple, répondaient en choeur aux questions de leur leader : « Est-ce que vous êtes prêts pour une Europe sociale ? OUI ! Contre une Europe du capital ? OUI ! » puis, après un bref surplace, se lançaient dans une course effrénée dès que leur leader affirmait : « En avant pour une Europe sociale ! » Chanson, aussi, dans les rangs de la CGT qui avait délégué une centaine de militants. Et les banderoles, quelle que soit leur langue, étaient claires : « Sauvons le pouvoir d’achat et la solidarité », « Augmenter les salaires, une priorité pour les travailleurs européens », « More for the workers, not only for the top » (plus pour les travailleurs, pas seulement pour les dirigeants)…

Du côté des délégations venues de l’est de l’Europe, les revendications étaient, bien entendu, similaires. Silvio Botta, un salarié de l’entreprise Delphi, équipementier automobile qui fournit de nombreuses marques de voitures, explique que son salaire lui suffit à peine à payer son loyer. Et il ajoute aussitôt qu’un souci fondamental le préoccupe : « J’ai de gros problèmes avec la direction de l’entreprise. Nous sommes constitués en syndicat depuis 2007, mais elle ne nous autorise pas dans l’usine. Ce problème se pose dans les deux sites que le groupe a en Roumanie… » Le syndicaliste insiste sur ce point qui l’inquiète : « l’état de la démocratie ».

Cette question revient régulièrement dans la bouche des participants. Joël Decaillon, secrétaire confédéral de la CES, précise ainsi que cette manifestation a été organisée pour « dire à l’UE qu’il faut revoir la répartition des richesses, car les inégalités explosent. C’est une situation inacceptable qui conditionne l’avenir de l’Europe et de sa démocratie ». « Nous avons un nombre de plus en plus important de salariés pauvres en Europe. Il faut donc de meilleurs salaires, mais aussi de meilleurs emplois. »

ceux qui gagnent toujours plus

Pendant ce temps, pourtant, réunis à quelques kilomètres de là, les ministres européens des Finances viennent d’achever une réunion de deux jours, pendant laquelle, de concert avec la Banque centrale européenne (BCE), ils ont appelé à la modération salariale. Le commissaire européen aux Affaires économiques, l’Espagnol Joaquin Almunia, a même précisé que « les hausses des salaires devraient dépendre des gains de productivité réalisés » et ne pas aller au-delà, cherchant visiblement à calmer les ardeurs revendicatives des travailleurs européens.

En fin de manifestation, sur la place des Congrès de Ljubljana, le président de la ZSSS, fédération slovène des syndicats libres, a dénoncé ceux qui gagnent toujours plus au détriment des travailleurs qui vivent toujours moins bien. Bernard Thibault lui a emboîté le pas et a constaté : « Si on écoute les ministres, si on écoute les employeurs, ce n’est jamais le bon moment pour augmenter les salaires dans tous les pays européens. Tantôt on nous explique que ça va mal, tantôt que ça va bien, mais que ce n’est toujours pas le bon moment pour augmenter les salaires ! » Ou encore John Monks, le secrétaire général de la CES, a vilipendé les écarts qui ne cessent de se creuser entre les riches et les pauvres. Avant de reprendre la route, un concert où résonnèrent « Bella Ciao », « Hasta siempre, Commandante », « Bandiera rossa » a permis aux salariés européens de continuer à échanger. Et de se promettre de se revoir au plus vite pour que le rapport de forces, manifeste à Ljubljana, porte ses fruits.

Fabien Perrier

Imprimer International - Article paru le 7 avril 2008

Monde

« Les ministres des Finances européens ont échoué »

Michaël Sommer est président de la confédération syndicale allemande DGB.

Quelle est la situation sociale en Allemagne ?

Michaël Sommer. Le nombre de chômeurs a baissé. Pour la première fois depuis des années, nous obtenons des augmentations de salaires dans différents secteurs. Mais d’un autre côté, nous voyons croître le nombre de précaires, notamment celui des intérimaires, et augmenter le nombre de « working poors », c’est-à-dire de personnes qui ne peuvent pas vivre des revenus de leur travail, y compris lorsqu’elles travaillent à temps plein : ils sont plus nombreux que les habitants de Slovénie (la population slovène est de 2 millions - NDLR). La situation évolue donc dans deux directions opposées : d’un côté, le développement économique positif et une évolution sociale plus favorable, de l’autre côté, les plus pauvres continuent à perdre. Les revenus du patrimoine prennent le pas sur les revenus salariaux.

Comment avez-vous accueilli les déclarations du président de la BCE ?

Michaël Sommer. Je rejette tout simplement l’ingérence de Jean-Claude Trichet dans les négociations tarifaires allemandes. Il y a, en Allemagne, ce que l’on appelle l’autonomie tarifaire et ni la Banque allemande ni le gouvernement ne s’immiscent dans les négociations.

Qu’attendez-vous du Conseil des ministres des Finances européens ?

Michaël Sommer. Rien de bon ! Le Conseil devrait vraiment agir en faveur de l’harmonisation fiscale en Europe. Mais là, ils ne font rien ! Ils parlent des salaires au lieu de remplir leurs tâches. Ils devraient trouver une régulation des marchés financiers afin que des crises telles que celles des subprimes ne se reproduisent pas. Je crois qu’ils ont échoué. C’est d’ailleurs ce que nous avons dit au premier ministre slovène (1) avec lequel nous avions rendez-vous.

(1) La Slovénie a, depuis janvier

et jusqu’à la fin du mois de juin,

la présidence de l’Union européenne.

Entretien réalisé par F. P.

Imprimer International - Article paru le 7 avril 2008

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samedi, avril 05, 2008

Ljubljana sous le signe de l’Euromanif

Union européenne . Les salariés européens se retrouvent aujourd’hui en Slovénie à l’appel de la CES pour protester contre précarité et bas salaires.

Ljubljana (Slovénie), envoyé spécial.

« Nous disons non à la pression des employeurs ! Nous disons non à ceux qui réclament des restrictions budgétaires. » En prononçant ces quelques mots le 4 avril depuis Ljubljana, en Slovénie, lors de la présentation de l’Euromanifestation qui s’y tient aujourd’hui, John Monks n’ignorait sans doute pas être en parfaite opposition avec les ministres des Finances européens, les représentants de la Banque centrale européenne (BCE) et de la Commission européenne, réunis en Eurogroupe à quelques kilomètres de là.

De concert, Jean-Claude Trichet, le président de la BCE, et Jean-Claude Juncker, le président de l’Eurogroupe des ministres des Finances, ont, de leur côté, appelé les gouvernements à faire tout leur possible pour assurer la maîtrise des salaires. « Nous encourageons les gouvernements à faire tout ce qu’ils peuvent, dans leur propre domaine de compétence, pour diminuer les risques que nous observons du côté de l’inflation », a, par exemple, déclaré Jean-Claude Trichet. Et il a notamment appelé les ministres des Finances à éviter d’alimenter les « effets de second tour », autrement dit une spirale inflationniste du côté des salaires.

Du côté des syndicats, le discours était tout autre. Dès son congrès, tenu à Séville en 2007, la CES avait décidé de mener la bataille du pouvoir d’achat. Plus que jamais, l’actualité lui donne raison. Avec un taux d’inflation record en mars (3,5 %) et des salaires qui stagnent, les citoyens européens en ont assez de voir leur pouvoir d’achat amputé, d’être précarisés et mis sous pression.

« Il est nécessaire d’envoyer des messages aux ministres européens de l’Économie et des Finances », a ainsi déclaré John Monks, le secrétaire général de la Confédération européenne des syndicats. Le premier message : exprimer les attentes des salariés dont « le pouvoir d’achat est en déclin » et revendiquer une augmentation des salaires et du pouvoir d’achat afin de stimuler la demande. Le deuxième : combattre la hausse des inégalités et la pauvreté, et instaurer des salaires minimaux décents. Le troisième : atteindre l’égalité des salaires entre les hommes et les femmes. Viennent ensuite d’autres points : des négociations collectives plus solides, notamment pour mettre un terme au dumping social ; des salaires équitables pour le secteur public, les travailleurs intérimaires et mobiles ; favoriser l’apprentissage tout au long de la vie et limiter les revenus des patrons. Bref, « nous sommes là pour faire face aux autorités européennes », a souligné John Monks.

Dans un entretien accordé à l’Humanité, Dusan Semolic, le président de la ZSSS (Fédération des syndicats libres slovènes), a confirmé cette analyse, en la déclinant en slovène. « La croissance économique est bonne, la productivité et les profits sont en hausse, mais les salaires ne réfléchissent pas ces évolutions alors que le coût de la vie augmente », a-t-il expliqué. Il s’attend donc à une participation importante des salariés slovènes qui clôtureront la manifestation de cet après-midi.

55 syndicats y participeront, issus de 27 pays différents. Plus de 35 000 manifestants sont attendus. Et pour donner du courage à leur lutte, les salariés des quatre coins de l’Europe seront accueillis en musique, en fin de manifestation. Discours et concerts se mêleront, aux abords du palais des Congrès, et si tout va bien, sous le soleil, exactement.

Fabien Perrier

Imprimer International - Article paru le 5 avril 2008

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vendredi, avril 04, 2008

Slovénie. La face sombre du prétendu « bon élève » de l’Europe de la rigueur

Dans ce pays réputé très respectueux des critères de l’UE, tout est loin d’être rose pour les salariés confrontés à une forte hausse du coût de la vie.

Ljubljana (Slovénie), envoyé spécial.

Pendant quelques jours, la Slovénie sera sous les feux de la rampe. Le 5 avril, c’est dans la capitale de ce « petit pays » coincé entre l’Autriche, la Croatie, l’Italie et la Hongrie que se tiendra le conseil Ecofin réunissant les ministres de l’Économie et des Finances des 27 pays de l’Union européenne (UE).

Ce « bon élève » des « nouveaux États membres » (depuis le 1er mai 2004) est aussi le premier à présider l’UE. De prime abord, il a tout pour plaire. L’économie est dynamique : le taux de croissance du PIB est de 6,1 % en 2007 (contre 2,4 % pour les 27 pays de l’UE), le taux de chômage affiché de 4,8 % (7,1 % de moyenne pour les 27). Selon Nebojsa Vukanovic, chercheur associé à l’École normale supérieure, « en ne suivant pas les recommandations du FMI, mais en suivant son propre modèle de développement, la Slovénie a accompli une mutation avec un certain succès ».

Pourtant, le salaire brut moyen, même s’il est plutôt plus élevé que dans les anciens pays de l’Est, ne culmine qu’à 1 523 euros. Et surtout, quand l’inflation dans la zone euro est de 3,5 %, elle grimpe ici à 6,4 %. « Les prix augmentent énormément ; le logement, l’alimentation : tout est touché », explique Janez Jaksa, du syndicat SDR. En effet, sur une année, l’indice des prix à la consommation, pour l’alimentation uniquement, s’est envolé de 13,5 %. Et l’augmentation des prix a été concomitante à l’introduction de l’euro, en 2007.

Parallèlement, comme le souligne le responsable syndical, « les salaires ont augmenté de 2 à 3 % ». Sans commune mesure, donc, avec l’augmentation du coût de la vie. Son analyse est éloquente : « Il n’y a qu’une très petite minorité de la population qui bénéficie des profits dégagés ici. »

Ces problèmes ne sont pas récents. En novembre 2007, par exemple, 60 000 manifestants étaient descendus dans les rues de la capitale pour réclamer une « Slovénie sociale ». La mauvaise répartition des fruits de la croissance a aussi eu un impact sur les élections présidentielles, qui ont eu lieu en novembre 2007. Lojze Peterle, le candidat du gouvernement de centre droit en place, s’est fait largement battre par Danilo Turk, candidat du centre gauche.

Du coup, une cohabitation préside aux destinées de ce pays de l’ancienne Yougoslavie. Hugues Sachter, maître de conférences et spécialiste des pays de l’Est, voit aussi dans ce résultat un symbole : « Les Slovènes souhaitent conserver des acquis de son identité titiste », autrement dit de la période où Tito dirigeait la Yougoslavie et développait une voie originale du communisme. Avec la lutte pour un meilleur pouvoir d’achat, celles pour préserver la sécurité sociale, les retraites et combattre le chômage seront donc, pour les Slovènes, aussi au coeur de la manifestation du 5 avril. Incontestablement, les projecteurs seront aussi braqués sur les écarts de salaire et de niveaux de vie, ceux qui existent en Slovénie, comme dans l’ensemble de l’Europe.

Fabien Perrier

Imprimer International - Article paru le 4 avril 2008

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jeudi, avril 03, 2008

Fatigué

La fatigue commence à se faire sentir. Il est l'heure d'aller se coucher. Et pourtant, je n'ai pas terminé la moitié de ce que je devais faire.
Tout ça parce que je suis allé à la réunion des copropriétaires. Ah ça, on y passe du temps. Pour, contre... J'avais déjà raconté tout l'an passé. Et cette fois encore, en quatre heures, nous avons fait le tour de la copropriété. Et cette fois encore, ce fut parfois énervant. Exemple: les voisins sont contre la barrière qui bloquent l'entrée des voitures dans la cour... Certes: mais surtout ceux qui ne dorment pas côté cour. Mais les autres, plus nombreux, ont moins de voix dans la coprop'. Alors du coup, les voitures vont continuer à sortir à 2 ou 3 heurs du mat'.
Bon, enfin, à part ça tout va bien: le cabinet qui gère l'immeuble a pris 3,58% d'augmentation de frais de gestion (pas mon salaire), 3% sur les frais pour le suivi des travaux à venir. Et à mon avis, notre cher responsable du cabinet au moins 3 kg depuis l'année dernière.

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mercredi, mars 12, 2008

Bruxelles, et ses vies parallèles.

Comme j'aime bien les questions européennes, et comme j'aime bien lire, me voilà plongé dans la littérature européenne. Plongé, c'est normal pour un Calamar. Mais là, je vais d'eaux troubles en fonds incertains. Le rapport avec l'Europe? Sa capitale institutionnelle: Bruxelles. Plus précisément? Un roman.
L'idée, à la base, peut paraitre simple et, reposant sur une enquête, fait voyager dans la capitale belge, dans le passé d'un patron de banque. Et envoie en Afrique. Dans les méandres d'une histoire douloureuse. Au final, il en ressort un regard sur la colonisation, sur l'immigration sur certains préjugés. Tout y est: les diamants, le Congo, les familles mouillées dans des histoires pas très saines etc. Une ambiance, aussi: la ville se fait pesante, aucun échappatoire ne parait possible. Bref, je recommande Des Vies parallèles, de José Ovejero.

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vendredi, février 29, 2008

Actualisation

Voilà un sacré bout de temps que le calamar, la tête sous l'eau, n'avait pas pris le temps de rédiger quelques lignes. Autant dire que ce blog risquait d'être envahi sous les eaux professionnelles et donc peu propices au libre cours des pensées. L'avantage d'un vendredi soir passé dans son nid douillet, c'est que l'on peut vaquer à différents activités habituellement mises de côté. Calamar, lui, a choisi de reprendre du clavier de ses petites pattes musclées. Dans les histoires à compter, certaines ne se racontent pas sur un lieu public. Donc, tant pis pour les anecdotes professionnelles. En revanche, donner des nouvelles à Davy Crockett et sa Mary, ainsi qu'à Davy Crockett Jr., dit aussi Victor, partager une humeur avec Clairounette et Sylvano, dire deux ou trois mots à Soeurette qui, entre deux entretiens et préparations de cours, trouve un peu de temps pour s'égarer ici, voilà ce à quoi le blog sert. Servir des humeurs sans suite.
Ce soir, c'est notre très vénéré Président qui m'inspire. Tout le monde a remarqué ses qualités d'orateur lors de discours divers et variés. Ou apprécié ses capacités à répondre aux journalistes au cours de conférences de presse diverses et variées. Ou encore, noté son audace majeure, celle qui a consisté à "relancer" l'Europe, prétendument en panne, alors qu'en fait, le processus décisionnel ne se portait pas si mal que ça - et ce n'est pas moi qui le dit, mais un groupe de farouches défenseurs du "Oui" au Traité constitutionnel de 2005 (par là). Référendum qu'il, le très vénéré, a soigneusement balayé d'un revers de manche sacrément méprisant en faisant passer, en douce, un traité "simplifié" qui reprend tout ce que les Français avaient refusé deux ans plus tôt. Mépris n°1.
Le tout-puissant ne saurait s'arrêter là. Lorsque l'Institution suprême de notre République, le Conseil Constitutionnel, retoque la loi qu'il souhaite faire passer - car, contrairement à sa promesse électorale de redonner du pouvoir d'achat aux français, il est des lois qui doivent, à ses yeux, lui rapporter plus - il décide là-encore de passer outre en demandant à l'institution concurrente... de proposer une façon d'appliquer la loi, coûte que coûte. Mèpris n°2. Celui des institutions, de la Constitution, et aussi du peuple qui a, en ce Conseil Constitutionnel, le garant de la Constitution, donc le garant du bon équilibre des pouvoirs dans la société (pour aller vite).
Jusqu'alors, effectivement, les mépris n'étaient formulés que dans une parole saine, qui se tenait. En langage châtié. Puis, la liste pourrait être allongée: culture, laïcité, éducation, mémoire etc., peu à peu, toutes les sphères sont touchées. Mais voilà, peu à peu, ce même tout puissant révèle son vrai visage: mépris, bien entendu, accompagné d'une bonne dose de mauvaise foi, comme le révèle les vidéos ici présentes (un clic et ops!). Une fois de plus, il réussit à faire parler de lui. Le problème, c'est qu'au lieu de résoudre les problèmes des Français, à toutes les échelles, et quelque soit le moment, il révèle la seule chose qui l'intéresse: la conquête du pouvoir, qui vire chaque jour un peu plus au déni de démocratie. Ce qui ne manque de rappeler les plus troubles périodes de l'histoire.

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vendredi, février 22, 2008

Raul Paz, hors des cases et loin des clichés

En vivo est un opus plein de vie où les cuivres et les percussions renforcent l’atmosphère chaleureuse, souvent entraînante, qui se dégage de chaque album de Raul Paz. Au cours d’un séjour pour quelques concerts à Cuba, l’artiste a enregistré cet album « best of ». Inattendu, tant les clichés qui circulent sur l’île sont nombreux. Qui eût dit, en effet, qu’il puisse s’y produire, lui qui a été persona non grata pendant quelques années ? Et pourtant, il en revient avec cet album ébouriffant. Un comble sans doute, pour ce chevelu poète. Ou alors le témoignage d’une société qui s’ouvre comme le laissent à penser ses commentaires dans le DVD du coffret. Lui qui refuse les cases, en musique comme en politique, semble prouver au moins une chose : l’ouverture musicale est possible. Et si l’art révélait l’état d’une société ?

Pourquoi avoir enregistré ce CD à Cuba ?

Raul Paz. Depuis des années, je représente une certaine cubanité : je fais une carrière européenne en tant que « chanteur cubain ». Or, depuis quinze ans, je n’avais pas pu jouer à Cuba pour différentes raisons. C’était un besoin : fermer la boucle en jouant à la maison. Au même moment, le ministère de la Culture cubaine m’a invité à m’y produire sur scène. J’ai convaincu tout le monde, la maison de disques, le producteur, etc. Un an et demi après, nous y étions !

Vous n’aviez jamais « pu jouer à Cuba, pour différentes raisons ». Lesquelles ?

Raul Paz. Cuba est un pays différent. En général, je n’aime pas trop parler de politique. Quand je suis parti étudier en France, j’ai été considéré comme persona non grata sans savoir pourquoi. Du coup, je suis rentré dans une espèce de « mécanisme diabolique » : d’abord je n’avais plus le droit de rentrer, puis j’ai eu le droit d’y aller en touriste. Et pour ce concert, malgré la proposition du ministre de la Culture, je n’avais pas de permis pour y jouer officiellement. Nous avons dû effectuer des démarches : ça a mis un peu de piment ! En tout cas, je n’allais pas à Cuba pour faire de la politique.

Aujourd’hui, vous y retournez en touriste ?

Raul Paz. Oui ! Mes parents y vivent. Et je peux y aller deux fois dans l’année.

Est-ce pour cela que vous ne voulez pas vous exprimer sur Cuba ?

Raul Paz. Non ! Aujourd’hui, je n’ai pas l’impression de ne pas pouvoir m’exprimer comme je veux. On n’en est plus là ! Mais je ne veux pas rentrer dans une polémique. Depuis cinquante ans, Cuba vit divisé en deux : ceux qui sont pour, ceux qui sont contre. Cette division n’a servi à rien, sauf à faire couler de l’encre aux journalistes ! Ce qui ne nous a pas beaucoup aidés, sinon à nous éloigner chaque fois un peu plus les uns des autres. Tu es bon ou mauvais, pro-Américain ou pro-Fidel… On entre dans des cases que je déteste. Cuba est un pays plein de paradoxes, c’est comme ça qu’il faut le vivre. Ce serait plus honnête de discuter de ce qui est bien et de ce qui ne l’est pas. On nous a enlevé des choses à Cuba, mais on nous en a appris d’autres. J’appartiens, je pense, à une génération qui ne vit plus dans cette polarité « pour ou contre », qui n’en a plus envie.

Quelle est la musique cubaine aujourd’hui ?

Raul Paz. Je suis arrivé en France en pleine « Buena Vista Social Club-mania ». D’une façon un peu rebelle, un peu naïve, j’ai tout fait pour m’en démarquer, pour révéler d’autres facettes musicales de mon pays, pour montrer que j’appartenais à une jeunesse qui avait d’autres façons de voir la musique, hors des cases, de voir la vie même. À Cuba, même si la jeunesse est parfois interdite de certaines choses, elle produit des créations très intéressantes. Au niveau musical, par exemple, La Havane a un festival de rap, un autre de rock. C’est là que j’ai connu la musique électronique faite par des Cubains, à dix-sept ans - en pleine période spéciale, quand c’était le plus dur ! J’ai été accusé de ne pas être cubain, ou pas vraiment cubain. Au début, je ne trouvais pas de maison de disques car je ne représentais pas une image cliché ! Paradoxalement, une maison américaine a signé avec moi à cette époque.

Quels thèmes abordez-vous dans vos chansons ?

Raul Paz. J’aime bien l’image du troubadour qui raconte des histoires, ce que sont la plupart de mes chansons. Je peux parler d’amour comme de solitude, de distance ou de joie… Elles racontent un quotidien qui révèle une façon d’être, de dire les choses avec beaucoup d’ambiguïté. J’aime beaucoup l’ambiguïté. Il n’y a pas une chanson plus ambiguë que Revolucion par exemple. Les pro-Cubains virulents, de France ou d’ailleurs, m’ont un peu accusé de faire une chanson anti-Cuba, et au même moment les Cubains en tournent un clip pour la télé. Ça me plaît que chacun se fasse sa propre idée de l’histoire, comme dans les livres de Cortazar.

La chanson conduit-elle à la réflexion ?

Raul Paz. Elle est un vecteur pour partager, communiquer, débattre et réfléchir. Je suis plus attiré par la réflexion que par le matraquage de ce qu’il faut croire ou pas. Ça m’amuse énormément que les Cubains prennent ma musique comme un acte patriotique et les autres comme un acte anti-cubain. C’est très bien comme cela. En jouant à Cuba, j’ai réussi à atteindre le public. C’est ce qui nous a manqué à Cuba : on nous a toujours enfermés dans des clichés, en tout cas ces dernières années. Nous sommes même parvenus à chanter des chansons comme Marijuana, qui ne parle pas seulement de drogue, mais aussi de la différence entre les êtres, de l’acceptation, etc. Certes, quand ils ont retransmis le concert à la télé, ils ont enlevé cette chanson comme une autre, Policia. Mais nous avons pu les jouer.

Cette censure dont vous parlez n’existe-elle pas dans toutes les sociétés ?

Raul Paz. Évidemment. Y compris dans celles dites des droits de l’homme, libres, etc. Elle est même extrêmement frappante depuis quelque temps. Voilà pourquoi quand il y a censure à Cuba, je ne veux pas l’utiliser et dire « vous voyez, ce sont des méchants ». Je ne suis pas là pour ça, mais pour réunir un maximum de gens, les faire réfléchir, et au moins leur donner un moment de communication pour que chacun fasse sa vie et que chacun ait le droit - qui nous a manqué plus que toute autre chose - de décider d’accepter ou de ne pas accepter.

Un chanteur doit-il être engagé ?

Raul Paz. Pas de la façon dont on l’entend « officiellement », d’un côté ou d’un autre ! Il doit être engagé avec soi-même, avec ce qu’il connaît, ses traditions. Nous ne sommes ni tout blanc ni tout noir, mais pleins de paradoxes. En tout cas, j’essaie d’être honnête avec moi-même.

Album En Vivo - CD-DVD Live, Naïve.

Entretien réalisé par Fabien Perrier

Article paru le 22 février 2008

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vendredi, février 01, 2008

Le b.a.-ba de Samarabalouf

Samarabalouf ! Que cache ce nom qui claque et marque les esprits ? Un joyeux trio composé de François Petit à la guitare, Luc Lambry à la contrebasse et Pierre Margerin à la guitare rythmique. Un trio tout droit venu du pays de Samara (nom latin de la Somme), adeptes du balouf (bal fou en verlan). Et, dans leurs compositions comme sur scène, le combo met le feu, mêlant allégrement jazz manouche au swing musette, flirtant alternativement avec la rumba, la java, le boogie voire le rock. Bref, ils offrent une musique des mélanges, où, jusqu’alors, seuls les instruments déterminaient les sentiments. À l’écoute de leur nouvel opus Bababa, la voix féminine qui vient chatouiller les oreilles avant même que les premiers sons des cordes ne les atteignent est donc inattendue. Quoique. Après avoir coopéré avec Agnès Jaoui et Loïc Lantoine, les trois compères ont rencontré Ange B, des Fabulous Trobadors, et ont eu l’envie « de faire un autre travail, sur la voix, sans chanson ». Défi relevé : le trio continue de « raconter des petites histoires en musique ». Rien n’est dit explicitement, tout est suggéré musicalement. L’émotion passe : humour, amour, amitié, joie, et parfois un brin de nostalgie s’enchaînent. Avec ce Bababa, Samarabalouf démontre que, sur scène comme sur les albums, un groupe peut être artisan de la musique, de A à Z, hors des sentiers battus.

Samarabalouf, Bababa (f2fmusic/L’Autre Distribution). À l’Européen (Paris) jusqu’au 2 février. Autres dates sur www.samarabalouf.com

Fabien Perrier

Article paru le 1er février 2008

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